DES RECOURS LÉGAUX EXISTENT FACE AU REFUS D'ÊTRE ÉVALUÉ, HOSPITALISÉ ET TRAITÉ

EXTRAITS TIRÉS DU GUIDE PRATIQUE SUR LES DROITS EN SANTÉ MENTALE

La Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui (Loi P-38), permet de priver temporairement une personne de sa liberté dans la mesure où son états mental présente un danger pour elle-même ou pour autrui. 

Il faut savoir qu’il s’agit tout d’abord d’une loi d’exception et qu’elle ne peut être utilisée que si certaines conditions sont présentes. La Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles‐mêmes ou pour autrui est l’application de l’article 27 du Code civil du Québec dont voici l’énoncé : « S’il y a des motifs sérieux de croire qu’une personne présente un danger pour elle‐même ou pour autrui en raison de son état mental, le tribunal peut, à la demande d’un médecin ou d’un intéressé, ordonner qu’elle soit, malgré l’absence de consentement, gardée provisoirement dans un établissement de santé ou de services sociaux pour y subir un examen psychiatrique ».

QUE DOIS-JE FAIRE SI J’AI DES MOTIFS SÉRIEUX DE CROIRE QUE L’ÉTAT MENTAL D’UNE AUTRE PERSONNE (UN DE MES PROCHES) PRÉSENTE UN DANGER POUR ELLE-MÊME OU POUR AUTRUI ?

Si l’on croit que l’état mental d’une personne proche représente un danger pour elle-même ou pour autrui, il est toujours préférable, dans un premier temps, d’obtenir la collaboration et le consentement de cette personne afin de la conduire dans un établissement afin qu’elle y soit évaluée.

En cas de refus

Une ordonnance de garde provisoire peut être demandée par un intéressé, par exemple un proche, ou encore par un médecin. Lorsque la personne refuse d’être conduite dans un centre hospitalier, on peut donc s’adresser à la Cour du Québec en présentant une demande d’ordonnance de garde provisoire afin d’obliger cette personne à se soumettre à une évaluation psychiatrique. Dans cette situation :

  • Il faudra démontrer au tribunal que l’état mental de la personne présente un danger réel et actuel pour elle-même ou pour autrui ;

  • La preuve devra comprendre des faits et des observations sur les comportements récents de la personne laissant croire que son état mental présente un danger pour elle-même ou pour autrui.

La Société québécoise de la schizophrénie ou une association de familles de votre région peut vous apporter le soutien et l'information sur le processus juridique pour obtenir une ordonnance afin d’obliger votre proche à se soumettre à une évaluation psychiatrique. N'hésitez pas à nous contacter.

En situation d’urgence

EXCEPTIONNELLEMENT, lorsqu’il y a urgence et que la situation nécessite une intervention rapide, vous devez faire appel directement aux services policiers. Lorsque l’état mental de la personne en cause présente un danger grave et immédiat, la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui permet de passer outre au consentement de la personne et à l’autorisation du tribunal. Cela fait en sorte que la personne sera conduite contre son gré dans un établissement en vue d’une garde préventive.

À RETENIR :

Sauf lorsqu’il y a urgence, vous devez recourir au tribunal (Cour du Québec) si vous avez des motifs sérieux de croire que l’état mental de l’un de vos proches présente un danger pour lui-même ou pour autrui.

EN SITUATION D’URGENCE, COMMENT FAUT-IL PROCÉDER POUR CONDUIRE UNE PERSONNE DANS UN ÉTABLISSEMENT LORSQU’ELLE S’Y REFUSE ?

Une personne peut être amenée dans un établissement contre son gré et sans l’autorisation du tribunal par un policier (agent de la paix), à la demande d’un intervenant d’un service d’aide en situation de crise de la région ou, si aucun intervenant n’est disponible en temps utile pour évaluer la situation, à la demande du titulaire de l’autorité parentale, dans le cas d’un usager mineur.

Si la personne est majeure, la demande devra être faite par :

  • Son mandataire, son tuteur ou son curateur ;

  • Son conjoint, un proche parent ou quelqu’un démontrant un intérêt particulier pour elle.

Le policier qui amène la personne à l’établissement doit avoir, dans cette situation, des motifs sérieux de croire que celle-ci présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui.

À RETENIR :

En santé mentale, la présence d’un danger grave et immédiat constitue une situation d’urgence nécessitant une action rapide. Ainsi, s’il y a un risque pour la vie ou l’intégrité d’un de vos proches ou pour vous-même, vous pouvez contacter le service d’aide en situation de crise de votre région. Votre association peut vous informer sur ce type de service. Toutefois, si aucun intervenant n’est disponible, vous pouvez, ainsi que le prévoit la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, contacter les services policiers de votre région.

EN SITUATION D’URGENCE, QUE SE PASSE-T-IL UNE FOIS QUE LA PERSONNE A ÉTÉ AMENÉE DANS UN ÉTABLISSEMENT PAR UN AGENT DE LA PAIX ?

Une fois la personne arrivée à l’établissement, celui-ci a l’obligation, en tenant toutefois compte des urgences médicales jugées prioritaires, de la prendre en charge immédiatement et de la faire examiner par un médecin (généralement un urgentologue). Si l’établissement n’est pas en mesure de mettre une personne sous garde en raison de son organisation ou de ses ressources, il doit immédiatement diriger celle-ci vers un autre établissement disposant des aménagements nécessaires. Si le médecin qui examine la personne est d’avis que son état mental présente un danger grave et immédiat, il doit la mettre sous garde préventive pendant au plus 72 heures.

Lorsque le médecin prend cette décision, il doit sans délai en informer le directeur des services professionnels ou le directeur général de l’établissement. Il peut aussi libérer la personne s’il juge qu’elle ne présente pas un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui.

À RETENIR :

La garde préventive ne permet pas de soumettre une personne à une évaluation psychiatrique. Si cette personne ne consent pas à l’évaluation ou si elle s’y oppose, l’établissement devra obtenir l’autorisation de la Cour du Québec, dans le délai fixé par la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui (Loi P38.001), pour lui faire subir cette évaluation. La garde autorisée par le tribunal en vue d’une évaluation psychiatrique est la garde provisoire.

Une garde provisoire peut donc être demandée dans deux situations : lorsque la personne présente un danger, mais que ce danger ne constitue pas une situation d’urgence et dans le cas où la personne mise sous garde préventive ne consent pas à l’évaluation.

QU’EST-CE QU’UNE ÉVALUATION PSYCHIATRIQUE ?

L’évaluation psychiatrique est la procédure autorisée par le tribunal en vue d’évaluer l’état mental d’une personne qui refuse d’être gardée dans un établissement. Elle permet de décider si sa garde en établissement est nécessaire ou non.

L’évaluation psychiatrique comprend, au départ, un examen psychiatrique. Si cet examen conclut à la nécessité de garder la personne en établissement, un second examen psychiatrique doit être effectué par un psychiatre différent, dans des délais bien précis. Le contenu de ces examens est précisé par le Code civil et la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui et comporte les éléments suivants :

  • La mention de l’examen de la personne par le psychiatre lui-même ;

  • La date de l’examen ;

  • Le diagnostic, même provisoire, sur l’état mental de la personne ;

  • L’opinion du psychiatre sur la gravité de l’état mental de la personne et sur ses conséquences probables ou possibles ;

  • Les motifs et les faits sur lesquels le psychiatre fonde son opinion et son diagnostic ainsi que les motifs et les faits qui lui ont été fournis par des tiers ;

  • Une évaluation de la nécessité d’une garde en établissement si la dangerosité est établie ;

  • Une évaluation de l’aptitude de la personne à prendre soin d’elle-même ou à gérer ses biens ;

  • Une évaluation de la nécessité, si l’inaptitude est établie, d’ouvrir un régime de protection.

Dans le cas où les deux examens psychiatriques permettent de conclure à la nécessité de la garde et que celle-ci est autorisée par le tribunal, l’établissement devra soumettre la personne à des examens périodiques, destinés à vérifier si la garde est toujours nécessaire. Ces examens doivent avoir lieu :

  • 21 jours à compter de la date de l’ordonnance de garde faisant suite à l’évaluation psychiatrique ;

  • Tous les 3 mois par la suite.

À RETENIR :

Dès qu’un examen psychiatrique permet de conclure que la garde n’est pas justifiée ou ne l’est plus, celle-ci doit prendre fin. La personne jusque-là mise sous garde pourra alors quitter l’établissement.

COMMENT PROCÈDE-T-ON POUR OBTENIR UNE AUTORISATION DU TRIBUNAL AFIN DE SOUMETTRE À UNE ÉVALUATION PSYCHIATRIQUE UNE PERSONNE QUI LA REFUSE OU S’Y OPPOSE ?

La demande d’évaluation psychiatrique (garde provisoire) est nécessaire lorsqu’une personne refuse de se soumettre à un tel examen et que l’on a des motifs sérieux de croire que son état mental présente un danger pour elle-même ou pour autrui.

Nous présentons brièvement la démarche judiciaire qu’il faut entreprendre dans cette situation :

  • La demande doit être présentée à la Cour du Québec sous forme de requête. La requête doit être présentée dans le district judiciaire où réside la personne qui refuse l’évaluation psychiatrique ;

  • Dans la requête, il faut prouver, par des faits récents et des comportements observables (menaces de suicide, désorganisation, violence et menaces envers autrui, etc.), que l’état mental réel et actuel de la personne est dangereux pour elle-même ou pour autrui ;

  • Avant de présenter la demande au tribunal ou au juge, on doit informer la personne qui refuse la garde ou l’évaluation au moins deux jours à l’avance, sauf en cas d’exemption ;

  • À la suite de l’audition de la requête, si le juge est convaincu de la preuve, il rendra un jugement qui ordonnera l’évaluation psychiatrique et il désignera l’établissement où la personne sera amenée. Précisons que celle-ci pourra y être amenée par un policier. Le jugement sera ensuite remis au Tribunal administratif du Québec, puisque ce tribunal peut réviser en tout temps le maintien de la garde ou de toute décision concernant une personne sous garde.

Rappelons que la demande de garde provisoire en vue de faire subir à une personne une évaluation psychiatrique peut être faite par un médecin ou par un intéressé (dont un proche).

SUR QUELS CRITÈRES SE BASE-T-ON POUR DÉTERMINER LA DANGEROSITÉ D’UNE PERSONNE ?

La loi ne définit pas ce qu’est la dangerosité, mais elle établit deux niveaux de dangerosité, soit :

  • Un danger pour la personne elle-même ou pour autrui, pouvant conduire à une garde provisoire. La garde provisoire est la garde autorisée par le tribunal afin de soumettre une personne à une évaluation psychiatrique en vue de déterminer si elle est ou non dangereuse en raison de son état mental.

  • Un danger grave et immédiat pouvant conduire à une garde préventive. La garde préventive est une mesure exceptionnelle permettant à un établissement de garder une personne contre son gré, c’est-à-dire sans son consentement et sans autorisation du tribunal, pendant une période d’au plus 72 heures, si l’état mental de cette personne présente un danger grave et immédiat. La garde provisoire peut être demandée par la suite.

Au départ, dans le cas de la garde préventive, la dangerosité est une question de faits qui est laissée au jugement d’un intervenant d’un service d’aide en situation de crise ou d’un policier, dans le cas où un intervenant d’un service d’aide en situation de crise n’est pas disponible. Si, selon leur jugement, l’état mental de la personne présente un danger grave et immédiat, celle-ci sera amenée dans un établissement où un médecin (un urgentologue, par exemple) pourra la mettre sous garde préventive. Par la suite, la dangerosité sera déterminée par l’évaluation psychiatrique. Précisons que durant la période de 72 heures prévue pour la garde préventive, on doit obtenir le consentement de la personne pour la soumettre à une évaluation psychiatrique, sinon l’établissement devra en obtenir l’autorisation de la Cour du Québec.

La loi établit deux niveaux de dangerosité dont le second niveau, soit le danger grave et immédiat, représente une situation d’urgence. Cette situation nécessite une intervention rapide afin de soustraire la personne à un danger pour sa vie ou son intégrité ou afin de protéger la vie ou l’intégrité d’autrui.

 

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